TEXTES ET PHOTOS:
SAMANTHA LUNDER

 

Vêtus de leur kilt à carreaux, Lambert, Johanna et Julien ne passent pas inaperçus dans les rues valaisannes. D’autant plus lorsqu’ils jouent les premières notes sur leurs instruments.

Le trio fait partie des Vallensis Highlanders, un groupe de cornemuses et de tambours typiquement écossais. Ils participeront au Military Tattoo cet été, célèbre parade militaire d’Edimbourg.

À chaque fois qu’ils portent leurs uniformes, les trois Valaisans se prêtent volontiers au jeu des photos, même si on les arrête souvent en anglais.

Au cœur de la vallée reliant les châteaux de Valère et de Tourbillon (VS), leur musique vient rompre le silence. Se mélangeant à la brise, les cornemuses résonnent jusqu’aux remparts. «Merci pour le concert, on vous entendait bien d’en haut!» lance une dame en balade au trio. En uniforme écossais, Lambert Zufferey, Johanna David et Julien Garrido reprennent de plus belle. Les deux hommes sont à la cornemuse, elle joue du tambour ténor, des percussions avec des gestes aériens. Parfaitement synchrones, ils marchent, le pas déterminé, en effectuant des mouvements bien précis, tout en interprétant leur morceau. Le public, qui n’avait pas prévu d’assister à une représentation en cet après-midi ensoleillé, est captivé: téléphone en main il filme et demande même une photo avec les trois cornemuseurs. «C’est comme si on jouait du cor des Alpes en Écosse: le son, la forme de l’instrument, les gens sont curieux», raconte Julien, qui avoue répondre volontiers à ces demandes. Johanna renchérit: «Juste là, en venant, une dame nous a crié: « Love you, guys! » On ne soupçonne pas qu’on est Valaisans, on nous parle souvent en anglais.»
Les trois musiciens font partie des Vallensis Highlanders, le groupe de cornemuses que Lambert a fondé en 2009 à Sierre. Une fois par semaine, ils se retrouvent avec la dizaine de membres pour répéter. Et ils ne passent que rarement inaperçus. «La plupart du temps on joue ensemble, mais il m’est arrivé de partir me balader dans les vignes, où tu te dis que tu ne vas embêter personne: le lendemain, toute la ville vient te dire qu’elle t’a entendu…» continue le fondateur. Car cet instrument est fait pour être joué principalement en extérieur, et le son qu’il produit est imposant. «Il y a la musique, mais aussi tout ce qui va autour avec le kilt qui intrigue, ajoute Lambert. Une fois, après un concert, je suis allé à 22h30 dans une station-service acheter un pique-nique. Là, avec mes chaussures qui claquent et mon bonnet à plumes, j’apercevais les gens guigner discrètement par-dessus les rayons, c’était très drôle.»

 

Ils paraderont au Military Tattoo d’Edimbourg

Ce fameux kilt, justement, fait aussi parler de lui. «La question « vous êtes à poil en dessous? » revient à tour de bras», ajoute le Valaisan. C’est même arrivé qu’on vienne regarder sans rien demander.» Alors, mythe ou réalité? On n’en saura rien de plus cet après-midi, les deux hommes se contenteront de dire qu’ils «ont les chaussures en dessous». Ils relèvent qu’historiquement cela faisait partie du code vestimentaire, mais que les règlements militaires se sont assouplis quand les femmes ont rejoint les rangs.

 

«C’est comme
si on jouait
du cor des Alpes
en Écosse.»

Julien Garrido, professeur de cornemuse

 

Le trio pratique la cornemuse comme un hobby, mais s’est déjà retrouvé à plusieurs reprises dans des représentations très officielles. Ils ont joué l’hymne national, donné un concert pour la police cantonale et même pour le Conseil fédéral. Mais l’événement de l’année qu’ils attendent impatiemment, c’est le Military Tattoo: la célèbre parade militaire d’Edimbourg, pour laquelle ils ont réussi à se qualifier cette année. Johanna et Lambert avaient déjà pu participer en 2017, ce sera une première pour Julien, 23 ans. Pour l’événement, ils ont 36 morceaux à apprendre par cœur en un mois et demi seulement: le 2 août ils seront en terre écossaises pour 24 représentations. «Il n’y a que cinquante places disponibles pour des musiciens indépendants et les prérequis techniques sont grands», ajoute Johanna. Lettre de motivation, CV musical et auditions sont un passage obligé pour espérer décrocher un ticket d’entrée. Au total, 1500 personnes participent à cette parade, composée essentiellement d’ensembles musicaux professionnels ou militaires. «En 2017, pendant qu’on défilait, j’ai pensé: il faut être digne et montrer qu’on est fier d’être là, se souvient, enthousiaste, Lambert. Ce n’est pas rien, et cela donnera peut-être envie à d’autres de commencer.»