TEXTES: FABIEN FEISSLI
PHOTOS: JEFF BRIGUET

Maquilleuse pour la chaîne de télévision Canal 9, depuis douze ans, Yasmine Pellaud apprête journalistes et invités pour le journal du soir. Elle n’a souvent que quelques minutes pour s’occuper de chacun.
À l’aide d’une poudre minérale spécialement conçue pour le petit écran, la Valaisanne matifie la peau afin d’éviter qu’elle ne brille à l’antenne. Elle cherche aussi à camoufler les petits défauts du visage.
Mais la préparation est également mentale. Le passage, obligatoire, par sa petite loge est l’occasion pour chacun, célébrités comme inconnus, de confier son stress ou de se changer les idées.

Dans sa petite loge, Yasmine Pellaud manie aussi bien le pinceau que la conversation. Assis sur le tabouret face à elle, Maxime Sigger se laisse faire sans broncher. Il faut dire que le présentateur de la chaîne valaisanne Canal 9 passe entre ses mains plusieurs fois par semaine depuis douze ans. Concentrée sur son visage, la maquilleuse l’interroge sur les invités du soir tout en appliquant différentes poudres sur sa peau. «Au début, j’avais de la peine à parler et à travailler en même temps. Mais ma patronne, durant mon apprentissage, m’engueulait quand je m’arrêtais pour regarder les clientes. Alors j’ai appris», raconte Yasmine. Avec un pinceau plus petit, elle s’attarde sur le contour des yeux de Maxime. «Le but, c’est de camoufler les petits défauts. Lui, par exemple, il est très cerné», explique la quadragénaire, sans détour. Chez d’autres, ce sera des rougeurs qu’il faudra masquer ou, à l’inverse, de la couleur à ajouter chez les gens très pâles.
«À la télévision, les lumières font que tout ressort. Pour nous, les hommes, ce n’est pas de la coquetterie, c’est important d’avoir le teint mat pour ne pas avoir le visage qui brille», précise le présentateur. D’ailleurs, le travail de Yasmine doit être le plus discret possible. «Avec le passage à la haute définition, le maquillage doit être très fin. Mes filles, par exemple, n’en revenaient pas quand je leur ai dit que je me faisais maquiller. Elles n’avaient jamais remarqué», assure Maxime. Et si, pour lui, c’est l’occasion de souffler dans sa course quotidienne, Yasmine, elle, ne peut pas se permettre de traîner. «Parfois, je n’ai que quelques minutes pour chaque invité. Avec l’expérience, je sais en trois secondes ce que je veux choisir comme poudre. Je dois également adapter le teint en fonction des couleurs du plateau.» Chez les femmes, l’opération prend, en général, un peu plus de temps. Yasmine allant parfois même jusqu’à retirer entièrement le maquillage de l’invitée avant de recommencer de zéro. «Quand je les regarde, je vois si elles sont plutôt naturelles ou sophistiquées. Ensuite, je discute avec elles pour savoir ce qu’elles veulent. Le but, c’est que cela reste dans leur style et qu’elles soient à l’aise.» Tout en parlant, elle peigne les cils de Maxime. «Cela ouvre le regard», glisse-t-elle en lui retirant son tablier.

Parfois, je suis hallucinée. En deux minutes, des gens que je ne connais pas me racontent leur vie et me confient des choses très intimes.

Yasmine Pellaud, maquilleuse

«Certains sont morts de trouille»

Tandis que le présentateur s’éclipse, son invité, Olivier Guex, chef du Service cantonal des forêts, des cours d’eau et du paysage, fait son apparition. Yasmine ne tarde pas à mettre en application les informations glanées auprès de Maxime. Très vite, elle entame la conversation afin de mettre le nouvel arrivé à l’aise. «C’est un petit moment de détente où la personne va pouvoir dire si elle est stressée. Certains sont morts de trouille, c’est impressionnant», confie celle qui a fait un apprentissage d’esthéticienne avant de suivre des cours dédiés spécialement au maquillage pour le théâtre ou le cinéma. Olivier Guex, lui, est un habitué des lieux. «C’est vrai que le maquillage, c’est toujours une phase de préparation sympa. Bon, la première fois, cela m’avait surpris parce que je ne savais pas du tout que cela se faisait», se souvient-il.
Quand il se lève du tabouret pour rejoindre les studios, Yasmine n’a plus qu’à nettoyer ses pinceaux avant d’avoir terminé sa mission, qui aura duré à peine trente minutes. «Mais ce n’est qu’une petite partie de ma journée, je gère aussi un institut de beauté à Savièse (VS)», précise la maquilleuse. Son travail pour Canal 9 est donc une manière de casser la routine. «C’est très enrichissant, ce sont souvent de brefs instants, mais j’apprécie d’être en contact avec tous ces gens passionnés.» Son poste lui permet aussi de rencontrer de nombreuses célébrités. «Mon fils dit que je connais tout le Valais, rigole-t-elle. C’est vrai que j’ai vu passer tous les sportifs, les chanteurs, les hommes politiques.» Parmi eux, Pascal Couchepin, Jean Benguigui, Bastian Baker et, forcément, un certain Christian Constantin. «Il est très différent quand il est seul avec quelqu’un que lorsqu’il est en public.»
Et le président du FC Sion n’est pas le seul à avoir réservé quelques surprises à Yasmine. «Parfois, je suis hallucinée. En deux minutes et demie, des gens que je ne connais pas me racontent leur vie et me confient des choses très intimes. Je dis souvent à mes collègues qu’il faut mettre une caméra cachée dans la loge. Les trucs qui se disent là-dedans, cela vaut de l’or.»