TEXTES: SAMANTHA LUNDER
PHOTOS: SEBASTIEN MORY

Dépanneur automobile, depuis sept ans à Marly, Fernando Tavares intervient partout dans le canton de Fribourg pour sortir de l’impasse les véhicules en difficulté.
Au quotidien, son téléphone ne cesse pas de sonner. Il peut enchaîner jusqu’à une bonne quinzaine de dépannages par jour.
Un chien ou des enfants coincés dans une voiture fermée à clé, des accidents sur l’autoroute ou des pneus crevés, le dépanneur affirme que chaque situation est unique.

«On ne va pas traîner, une dame nous attend, ses clés sont enfermées dans la voiture», lance Fernando Tavares en sautant dans sa dépanneuse. Il est un peu avant 9h, ce lundi matin, et le Fribourgeois a commencé sa semaine à l’aube. «Ce type d’appels, cela arrive tout le temps, les clés restent dedans et les gens ne parviennent pas à rouvrir seuls», explique celui qui travaille chez Bibisch Auto, à Marly (FR), depuis sept ans. Son métier est avant tout une vraie passion, «il en faut, sinon autant changer», se confie-t-il alors que son téléphone retentit. «C’est comme ça toute la journée, vous verrez, on ne s’arrête jamais!»

«Il faut trouver les mots pour le parent»

Au bout du fil, un client tombé en panne pendant le week-end. Il veut prendre des nouvelles de sa voiture. Fernando l’informe qu’elle sera prête dans l’après-midi, et il n’a pas le temps de raccrocher que la sonnerie résonne de nouveau. «Oui, Madame, je suis en chemin, j’arrive dans cinq minutes», répond-il à celle qui l’attend devant chez elle à Grolley (FR), pour ses clés emprisonnées. «Les journées les plus chargées, on peut faire une bonne quinzaine de dépannages, on finit tard!» poursuit-il en arrivant sur les lieux de la première intervention. Outils en main, Fernando ne perd pas une minute, il salue avec courtoisie la dame qui nous attend à l’extérieur et fonce sur la portière. «Il y a un petit chien dedans», lui crie-t-elle depuis le trottoir, inquiète de voir le soleil et la chaleur arriver. Fernando la rassure en lui expliquant que tout devrait être réglé rapidement. Il nous expliquera, plus tard, que cette situation se produit aussi avec des enfants. «Et c’est souvent encore plus stressant, car il faut trouver les mots pour mettre le parent en confiance. On fait un travail aussi psychologique.»
Il place un coussinet dans la fente de la portière, qu’il gonfle pour créer une ouverture de quelques millimètres. Grâce à une tringle, il soulève la poignée intérieure. En moins de cinq minutes, la porte s’ouvre et «Pepsi» saute du siège pour rejoindre sa maîtresse. «Là, c’était facile, parfois on doit avoir un peu plus d’imagination comme allumer des fusibles sous le capot pour ouvrir, ou simplement faire comme un serrurier.»
Des dépannages comme celui-ci, Fernando les enchaîne, mais il assure qu’aucun ne se ressemble. «Ce matin, la dame n’était pas fâchée d’avoir attendu. Parfois cela se passe vraiment moins bien, continue-t-il. Les gens ne se rendent pas compte, mais il peut y avoir deux heures d’écart entre le moment où ils appellent leur assurance et celui où je reçois la demande d’intervention. Ensuite il faut encore rejoindre l’endroit.»

«Les journées les plus chargées, on peut faire une bonne quinzaine de dépannages.»

Fernando Tavares, dépanneur automobile

Car son garage couvre une vaste zone dans le canton, jusqu’en Suisse alémanique. «En général, on appelle le client pour demander ce qu’il se passe et décider quelle intervention mettre en priorité, cela peut être stressant quand on a quatre dépannages en attente. Il arrive aussi que les clients soient durs avec nous.

«Il faut garder son sang-froid»

Il faut rester professionnel en gardant son sang-froid. Et c’est toujours un peu plus difficile après le dixième dépannage dans une même journée.» Alors, même s’il est appelé sur un deuxième endroit le quart d’heure suivant, Fernando nous assure qu’on est dans une matinée «plutôt calme».
S’il adore ce qu’il fait, Fernando confie aussi que certains dépannages sont plus faciles que d’autres. Un pneu crevé après un choc contre une pierre, comme la seconde intervention de la matinée, c’est un jeu d’enfant: il remorque la camionnette jusqu’au garage du client pour que sa roue y soit changée et c’est l’affaire d’une dizaine de minutes. Mais, parfois, c’est bien plus long et contraignant. «Je me souviens de cette voiture tombée en contrebas à Marly, juste derrière le garage. J’ai commencé à 14h et fini à 20h!»
Il confie que les moments les plus difficiles à vivre sont les dépannages lors d’accidents. «Un soir, à 23h30, la police m’a demandé de venir alors qu’un véhicule venait de faire une embardée. J’ai vu beaucoup de sang sur place… et un siège enfant à l’arrière. En rentrant, je ne pouvais pas fermer l’œil.» Un collègue l’appellera, une heure plus tard pour lui dire qu’il connaît les parents et la petite fille, et que heureusement tout le monde va bien. «Le papa avait simplement une blessure légère, mais impressionnante, à l’arcade sourcilière, qui saignait abondamment. Cela m’a marqué.»
Pour Fernando, peu importe ce sur quoi il va tomber, il faut toujours faire preuve d’humanité. «Le téléphone peut sonner à toute heure pour que je dépanne de la tôle, mais il ne faut jamais oublier qu’il y a une personne en souci sur place.»