TEXTES: SAMANTHA LUNDER
PHOTOS: ROBIN FINGER / 7SKY.LIFE

 

Baptiste Delalay est en fauteuil roulant, depuis huit ans, à cause d’un accident de moto qui l’a rendu paraplégique.

En septembre 2017, le Valaisan s’est élancé en parapente d’un sommet de 4000 mètres pour réaliser un rêve: montrer «qu’on peut tout faire, même sur une chaise».

Il a 26 ans et vient de terminer une formation pour être coach de vie. Il veut aider d’autres personnes avec un handicap à réaliser leurs rêves.

«J’aimerais aider les gens à faire de leur plus grand challenge leur plus grande force.» En voyant Baptiste s’élancer du haut d’une falaise, accroché à une toile, ses mots résonnent. Son «rêve un peu dingue» comme il aime le décrire, le Valaisan de 26 ans l’a réalisé en septembre 2017. Un matin, au sommet du Breithorn (VS), il a laissé son fauteuil roulant hors de l’hélicoptère pour sauter dans le vide en parapente. Sept longues minutes de descente, qui n’ont fait que confirmer les certitudes du Valaisan: le handicap n’arrête pas un homme. «Pour moi, c’était très symbolique de voir le monde d’en haut, alors qu’au quotidien je ne vois les gens que d’en bas, depuis ma chaise», raconte-t-il. Installé à la table d’une terrasse au Domaine des Îles à Sion, Baptiste Delalay se souvient de cette vidéo tournée pendant son vol avec sérénité. L’accident de moto, en 2011, lui a volé la partie inférieure de son corps, mais de loin pas sa vie toute entière. «Au moment où le médecin m’a dit que j’étais paralysé des jambes jusqu’au torse, j’ai plaisanté: «Mais bon, il me reste les bras et la tête!» confie-t-il en souriant. Cette énergie, il a choisi de la puiser au plus profond de lui, pour ne pas se laisser aller. «Je me rappelle bien ce jour où, en regardant par la fenêtre de ma chambre à la Suva, à Sion, j’ai réalisé que je n’avais plus de boulot, d’autonomie, de permis de conduire et de copine. Il fallait que je me bouge.»

 

«Avant l’accident, je n’y
connaissais rien au handicap»

Il voudrait ainsi que la société puisse s’ouvrir encore davantage aux personnes en fauteuil et qu’elle adapte mieux ses infrastructures. «Au tout début, quand je suis sorti de l’hôpital, les regards de pitié, de compassion que les gens posaient sur moi n’étaient pas faciles à accepter, surtout quand ils étaient insistants, témoigne-t-il. Aujourd’hui, je me suis inventé une nouvelle histoire, que je me raconte: je me dis qu’ils me regardent parce que je suis jeune, souriant ou parce que je roule vite.»

 

«Pour moi, c’était très symbolique
de voir le monde d’en haut.»

Baptiste Delalay

 

C’est là que l’idée de filmer son vol en parapente lui vient à l’esprit. «Pendant mes huit mois de rééducation, je visionnais des vidéos de développement personnel, mais j’avais envie qu’on me montre aussi des gens en chaise.» Faute d’en avoir trouvé, il décide lui-même de se lancer. «Avant l’accident, je n’y connaissais rien au handicap. Je trouve important de montrer qu’on peut continuer notre vie malgré un grave accident et, surtout, de donner une image plus positive des personnes comme moi.» Entouré d’une équipe de tournage et de l’un de ses meilleurs amis, Jonas, il réalise ces trois minutes de film. Il a publié la vidéo, en ce début d’année, sur les réseaux sociaux de son association Para no limit.

Il a trouvé sa voie dans le coaching

Cet ancien ferblantier a dû se reconstruire aussi professionnellement. Il vient, aujourd’hui, de terminer deux ans de formation pour être coach de vie indépendant. «J’avais le droit à une reconversion personnelle grâce à l’AI. On m’a proposé dessinateur en bâtiment ou employé de commerce, mais rester statique devant un ordinateur, c’était impossible avec mes douleurs. J’ai donc dû commencer à réfléchir à une option qui serait adaptée à mes besoins», raconte Baptiste.

Avec des conférences dans des entreprises, des écoles ou des centres de santé, il a trouvé sa voie dans le coaching. Il espère, maintenant, pouvoir donner un nouveau souffle à la reconnaissance du handicap par son expérience. «J’aimerais en parallèle aussi réaliser de nouveaux contenus pour l’association, comme je l’ai fait moi-même avec ma vidéo de parapente, pour mettre en lumière d’autres personnes que moi dans le handicap.» S’il dit avoir réussi à se reconstruire grâce au soutien de ses amis, de sa famille et de certaines personnes qui l’ont suivi professionnellement, il est convaincu qu’il reste un vaste chemin à parcourir pour accompagner les personnes dans leur réinsertion. Depuis plusieurs mois, il nourrit un projet encore plus particulier. «J’ai récupéré la chaise roulante d’un ami qui est malheureusement décédé. J’aimerais y asseoir les assureurs qui prennent des décisions pour nous, pour qu’ils se rendent vraiment compte de toutes les contraintes qu’on a au quotidien.»
Chaque jour, Baptiste défend cette indépendance qu’il a réussi lui-même à acquérir et qu’il veut pouvoir améliorer au service des autres. Il a repassé son permis de conduire, alors qu’il était toujours à l’hôpital et a décidé de vivre seul dans un appartement à Sion. «C’est sûr que mon handicap a changé des choses: je n’ai plus pu exercer mon métier, ma passion pour le foot, la nage, le VTT. Mais j’ai retrouvé d’autres sports comme le vélo de descente, le curling, du basket, finalement je pouvais tout faire.» Il est même remonté sur une moto à trois roues, ou derrière un ami. «Pour moi, ce moment était important, il m’a permis de retrouver ma liberté.»

FIN